Bidon bidonville

Publié le par Isa

Elle me raconte un quartier derrière l’aéroport de Mérignac, pas loin d’une déchetterie, des années 60-70 à aujourd’hui et moi j’imprime…
Au départ une famille peut-être Espagnole pourquoi pas Portugaise, une cabane flouée sur un vague terrain. Des parents au pays qui viennent chercher la liberté, la tête pleine d’espoir d’un vague métier, assorti d’un vague salaire. Un regroupement familial comme on dit, un serrage de coude en vérité. L’endroit est moche mais libre et les planches se clouent facilement. Une cabane, deux cabanes, trois cabanes, personne ne s’en soucie, un bidonville est né. Espagnols et Portugais se côtoient, la municipalité les ignore, la population les snobe. Le quartier n’a pas belle mine, qu’importe quand on veut des nouvelles du pays c’est là qu’on se rend, c’est là qu’elle se rend. Le quartier n’a pas bonne réputation, si un vol est commis à 30 kilomètres alentours, c’est ici que les uniformes débarquent. Ils n’ont pas toujours tort d’ailleurs, certains vivent de petits larcins mais petitement, ça n’excuse rien paraît-il. Bref, de toute façon tout le monde ferme les yeux sur ce non quartier et ses non habitants. Quelques décennies plus tard une belle cage à poule est construite…5 étages, pas d’ascenseur, pas de balcon, pas d’espace, une cage à poule on vous dit. Les murs sont vite détériorés, les entrées interdites aux âmes sensibles, tout va à vau l’eau, c’est des étrangers on vous dit. Et puis de grandes idées en grandes idées, les humanistes font leur entrée, des maisons en carton avec jardinet seront construites…c’est du précaire, “pas plus de dix ans, après on construit de vraies maisons”. Dix ans ils avaient dit. Il fait humide, il fait froid, le carton c’est pas l’idéal, alors les portugais ont fait leurs valises, enfin ceux qui le pouvaient. Valises en carton pour maisons en béton avec des métiers pas bidons et des salaires un peu folichons, oui certains ont pu partir.

Et dix ans plus tard alors ? Et bien 10 ans plus tard, on consolide les maisons en carton, “détruire pourquoi pas, mais où mettrions nous tous ces gens ?”. Les mœurs ont changé, on ne parque plus les gens, on laisse quand même la cage à poule mais de temps à autre on la repeint. C’est vrai le gris du béton c’est triste alors qu’avec le bleu lavande on se sent tout de suite mieux, même sans ascenseur, sans espace et sans balcon, mais ça on l’a déjà dit, alors on passe à autre chose.

Elle me dit que les maisons sont jolies maintenant, un peu cubes, un peu petites les fenêtres, mais c’est joli quand même. Elle me dit aussi que les Marocains et les Algériens ont remplacé les Portugais, en partie, parce que sa mère à elle y vit toujours. Elle me dit que les Arabes restent entre eux, mais qu’ils sont très serviables et gentils quand même. Elle me dit que leurs enfants jouent tard le soir et font du bruit…comme des enfants : “Mais ils sont pas méchants c’est juste embêtant quand on veut se coucher tôt”. Elle me raconte qu’il n’y a pas de commerce pour dépanner, qu’il faut traverser la rocade pour en trouver, que ce n’est pas pratique pour toutes les personnes âgées qui vivent là. Il paraît que le maire va faire quelque chose, qu’un multi services va voir le jour, c’est ce qu’il a dit le maire…y a quelques années.

Dernièrement il est venu dans le quartier, il était surpris, les fleurs étaient toujours là, les maisons entretenues, le quartier encore agréable. Il a distribué les bons points ; si les habitants se tiennent bien qui sait, ils auront peut être une image. En attendant ils peuvent acheter leurs maisons : 100000 euros. Elle me dit que ça fait cher pour une cabane flouée sur un vague terrain.

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Z
Des choses malheureuses joliment dites avec un rythme chantant...
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I
<br /> Il faut rire malgré tout<br /> <br /> <br />
L
Et quand dans les maisons en carton, se trouvent par malheur (supplémentaire) des sans-papiers, la France qui les éjecte continue à me chiffonner...
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I
<br /> pas mieux, je pense d'ailleurs souvent à ceux d'Auch et me demande parmi les familles que j'ai connues lesquelles sont encore là<br /> <br /> <br />
G
si nous viviont tous dans des bidonvilles , nous seriont tous plus humains.
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I
<br /> Je n'en suis pas certaine Gari, les conditions de vie difficiles ne te rendent pas plus humain<br /> <br /> <br />